mardi 6 octobre 2015

Le cap des 1000 hdv

Forcément, être instructeur, ça bouffe du temps, du lever au coucher du soleil, très exactement. C'est pour cela que j'ai pris du retard dans mes montages vidéos, et dans mes publications. Rassurez-vous, après 500 heures de vol en tant qu'instructeur, la restriction est maintenant levée, et un nouveau changement de décor s'opère d'ores et déjà en coulisse ...

Par ailleurs, n'ayant pas vraiment d'attaches (conjugale, ou quelle qu'elle soit), je souhaite en profiter un maximum, que ce soit en faisant de l'instruction de nuit, de la découverte IFR (si jamais il y a des intéressés ;-)), ou encore, tout simplement, profiter de ma licence de pilote pour voyager à travers la France, accompagnés des vieux potes du lycée, voire même, de la promo. Ceux qui me connaissent un peu savent que j'ai toujours été opposé au concept du "garder la main en vol local". Un avion, c'est fait pour voyager, et je m'y tiens. Et en plus, j'avais promis à bon nombre de mes potes de les emmener au moins une fois. Effectivement, avec des potes dorénavant éparpillés au quatre coins de la France à cause des études supérieures, il n'y a pas 10.000 solutions, et le plus simple reste encore de prendre son avion sous le bras pour aller se voir, comme je l'avais fait pour la TGS à Toulouse

Mais depuis début Juillet, pour une durée pour le moment limitée, j'ai eu la chance d'intégrer de nouveau l'ESMA, mais cette fois-ci en tant qu'instructeur, pour la dernière promotion de pilotes cadets chinois. C'est une toute nouvelle façon de faire de l'instruction de vol que je découvre à peu près en même temps que mes élèves avancent tellement l'environnement est complexe: plannings, temps de repos équipages, restrictions mécaniques (MEL/CDL), programmes spécifiques à la CAAC ... Je me souviens clairement que contrairement à beaucoup de ces concurrents, l'ESMA possède une documentation très dense et riche. Mais j'avoue redécouvrir cet aspect, maintenant qu'il faut que je tienne compte de tout ça à chaque vol, le tout sans oublier les objectifs pédagogiques. C'est vrai que comparé à l'aéroclub, on bosse "moins", compte tenu de l'encadrement strict, mais d'un autre côté, le boulot est plus intense vu que l'instructeur revêt un double rôle: d'un côté, il a la charge de la bonne conduite du vol malgré tout - ça, ça ne change pas -, mais il doit aussi être le plus performant possible pour être sûr que l'élève sera au niveau standard à la fin de chaque séance. D'un côté, l'élève progresse plus vite, c'est vrai, mais d'un autre côté, il y est contraint. Pour finir, il y a un dernier critère dont je ne soupçonnais pas l'existence avant d'avoir la charge de former des cadets étrangers. Force est de constater que l'anglais était déjà pour moi un gros challenge, mais quand les différences culturelles s'en mêlent, l'instruction prend un autre dimension, l'élève devant aussi avoir la bonne mentalité quand il s'installe à bord et comprendre son environnement et ce qu'il fait.

Sans vouloir choquer personne, pour moi, c'est ce qui fait toute la richesse du métier d'instructeur. La satisfaction que j'éprouve résulte exclusivement du fait de se dire que, probablement comme pour moi il y a environ 3 ans lorsque je suis arrivé à l'ESMA, mes élèves qui ne connaissaient rien au pilotage quand on me les a confié, sont aujourd'hui parfaitement capable de voler en solo, en se posant les bonnes questions, et en ayant assimilé les bases du pilotage. Dans 18 mois, ces cadets seront sur A320 ou sur Boeing 737NG, ou sur un autre airliner, et le fait de se dire que ces élèves pourraient bien être le pilote qui fait atterrir votre avion de ligne lors d'un voyage touristique en chine, par exemple, ça motive, et leur réussite est d'autant plus gratifiante.



Et puis, comme dans tout bouleau d'instructeur, à côté de nos travaux classique, il y a les extra. Je pensais que compte tenu de mon activité, il me serait difficile de pouvoir trouver un avion afin de me rendre au fly'in annuel de Passion Pilote. Comme l'an dernier, nous avions choisi de nous retrouver à Nevers, pour sa position centrale, et pour leur accueil toujours au top, avec une petite subtilité cette année: la date retenue pour l'événement était le samedi 28 septembre. Finalement, j'ai pu avoir un DA42 de l'ESMA à ma disposition pour m'y rendre, alors il ne m'a pas fallu longtemps pour trouver des GoPro pour filmer ce vol de 1h50 aller, 1h50 retour, dont je vous livre les images ci-dessous après 10 jours de travail sur le banc de montage:


L'édition 2015 du fly-in Passion Pilote a réuni 32 participants venus d'un peu partout en France et de la Suisse, grâce à 9 avions tous différents ! Du classique PA28 Archer, P2002JF, ou autres DR400 ou Cessna 152, au moins classique Cessna 177RG, Cirrus SR22, sans oublier notre DA42, et même un Piper J3 Cub, piloté par un de mes anciens padawan de l'aéroclub Paul Tissandier ! Cette année encore, rendez-vous exceptionnel, dont tout le monde est reparti avec une seule idée en tête: remettre ça pour l'an prochain, et pour ceux comme moi qui ont eu la chance d'avoir une glacière à portée de main, finir les restes de barbecue. On a hâte !

That's all folks, and Fly safe. :-)

lundi 18 mai 2015

Un baptême de l'air pour un mariage

Même si être instructeur, c'est faire beaucoup de tours de piste, certains vols sortent tellement de l'ordinaire qu'on se demande si leur réalisation est possible ... Alors lorsque le club a reçu cette demande très spéciale, j'ai fini par me dire qu'il était possible que cela soit probablement le seul vol de ce type que je ferai dans ma carrière !

Un baptême pour deux personnes, durant laquelle le passager va demander sa compagne en mariage, ça n'arrive pas tous les 4 matins, alors merci à Jp et à Guillaume pour le prêt de deux GoPro supplémentaires, merci à l'aéroclub pour l'organisation, et merci à mes deux passagers qui se sont déclarés leurs flammes à bord de notre rutilant C172R, face au château de Versailles à 1500ft, entre LFPX et LFPZ.

Je vous propose donc de revivre ces quelques minutes au travers d'une toute petite vidéo qui leur est pleinement destiné.


Pour la petite histoire, monsieur est pilote sur Rafale, qui a commencé à voler à l'âge de 18 ans sur l'aérodrome de Saint-Cyr-l'Ecole, quand à mademoi ... pardon, madame, elle est chef de cabine à Air France. Alors le décor était tout indiqué pour cet événement. Je leur souhaite beaucoup de bonheur et de réussite.

PS: pour les petits malins qui attendent encore, la vidéo de l'IFR est en cours de montage, si si ... :)

mardi 27 janvier 2015

Du simulateur au vol réel

C'était un vieux défi qu'on s'était fixé en 2013 avec de vieux amis: aller au Toulouse Game Show en 2014 ... en avion privé. Alors bienvenue à bord du F-HAPT, le petit Cessna 172 SP de l'aéroclub Paul Tissandier, qui fait route depuis Toussus-le-Noble vers Toulouse Blagnac, avec une escale à Poitiers pour l'avitaillement et récupérer mon dernier passager. Une traversée de France comme j'en rêvais depuis ma 300nm solo, et en prime, avec un départ magique face à Paris, et des images comme celle de cette quasi verticale d'Orly.



Mais en fait, c'est le retour qui va rester dans les souvenirs de mes passagers et moi, de par son intensité technique très rare.

Comme avant chaque vol, on commence par un briefing, et aujourd'hui, il est complexe, et, non sans flair, très axé sur la météo. Les conditions au départ nous permette le départ en VFR Spécial vers Toulouse Lasbordes pour faire le plein de 100LL, puis de partir de LFCL sous plan de vol Z. le TAF de Toussus annonce TEMPO BKN004 que je m'empresse de comparer aux minimas de la VOR 07L à Toussus, sachant qu'au pire, une percée ILS serait toujours possible. La TEMSI ne révèle pas de givrage sous le FL110, la couche d'altostratus du FL70 se désagrégeant progressivement au fur et à mesure que nous ferions route vers le nord. Décision est prise de se mettre en route. Une route simple, en fait, l'airway A34 de LACOU jusqu'à BALAN

Le décollage de Toulouse se fait sous une bonne pluie. Petit tour de piste en VFR Spécial pour rallier Lasbordes via la trajectoire publiée, puis départ dans les mêmes conditions après avoir pris la clairance chez Toulouse Approche, qui nous donne le départ omnidirectionel sur LACOU en montée vers 3000ft et de garder les conditions VMC. Après LACOU, la montée vers le FL90 nous plonge pour la première fois en IMC. Coup d’œil à la sonde de température, qui indique +2 degrés. Comme prévu, au fur et à mesure de notre route, le ciel se dégage, et mes passagers observent les couleurs extrêmement vives du coucher de soleil, tellement vives qu'elles se reflètent sur les ailes et le fuselage de notre Cessna qui croise à 90kts de GS au FL90, pendant que je prépare notre arrivée sur Poitiers.

Nous contactons Limoges Approche et je continue à utiliser le G1000 pour raccourcir au maximum la trajectoire, clairé direct sur BALAN, et j'en profite pour calculer le temps d'attente possible avant dégagement sur Châteauroux LFLX, qui est l'aérodrome de dégagement que j'ai choisi pour cette branche.

Le contrôleur de Limoges nous shoote à son tour vers Poitiers Approche. Petit problème, le contrôleur nous prévient que la météo est très inférieure aux prévisions, avec seulement 4000m de visibilité, et un plafond couvert à 300ft, en nous précisant que les deux avions qui nous précédaient (un 737 de Ryanair et un ATR42 d'Hop!) n'ont pas pu se poser à l'issue de la VOR 03 et ont dû se dérouter. Je choppe le manuel de vol et jette un coup d’œil aux performances pour un atterrissage avec une composante de vent de 15kts arrière et trouve 1100m, que je confronte à la carte de Poitiers où la piste affiche une LDA de 2350m.

"- Foxtrot-Papa-Tango, I see that you have another flight plan for Toussus this evening ?
- Affirm.
- Are you ready to copy the latest weather report at Toussus ?
- Go ahead.
- Visibility 500m, invisible sky, so there is less than 100ft ceiling. And I have one aircraft diverting from Toussus to Poitiers now.
- Okay, so we would like to make the ILS runway 21, we are in compliance with the performances.
- Euuuuh Fox-Papa-Tango, just in case you cannot land at Poitiers, what's your alternate airport ?
- Châteauroux, Foxtrot-Papa-Tango.
- Fox-Papa-Tango, are you ready to copy latest weather at Châteauroux ?
- Go ahead.
- Fox-Papa-Tango, visibility 8 kilometers, ceiling 100ft.
- Okay we will make the ILS runway 21 at Poitiers, we should have the minimas, Foxtrot-Papa-Tango.
- Fox-Papa-Tango, I'm sorry but if you can't land at Poitiers or at Châteauroux, where do you go ?
- ... Stand-by, Foxtrot-Papa-Tango."

Je pense que mes passagers ne devaient pas comprendre grand chose à ce qu'il se passait, mais de mon côté, la situation s'est nettement complexifiée. Toussus, Pontoise, Châteauroux, Rouen, Beauvais, ... Tout est inaccessible au nord de Poitiers ! Avec le recul, maintenant, je pense que je me suis directement inspiré d'une mise en situation que j'ai eu en simulateur de vol DA42, il y a 10 mois, pendant ma formation en vol. Mon instructeur avait sélectionné pour mon terrain une météo bien inférieure aux autres plateformes du coin, pour tester mes capacités d'adaptation et ma prise de décision. Sauf que là, je suis aux commandes, je n'ai pas d'instructeur en place droite, je ne suis pas assis dans un simulateur, et 2 passagers comptent sur moi pour les amener à destination. On peut en dire tout autant de la percée qui m'attend sur l'ILS 21 à Poitiers. Ma dernière percée de ce style remonte à un backseat en DA42, quasiment 1 an auparavant, en décembre 2013. Sauf que cette fois-ci, c'est moi qui suis aux commandes, et de la même façon, je n'ai aucun instructeur en place droite pour m'assister.

Pendant que le pilote automatique suit le trait du début de l'arrivée BALAN2A, je décide d'annoncer à mes passagers que je vais m'isoler afin qu'ils puissent discuter entre eux pendant que je me concentre sur la préparation de l'avion.

En fait, le G1000 permet d'afficher le rayon d'autonomie avec ou sans la réserve finale, tout en tenant compte du vent calculé par le GPS et l'ADC. En recoupant cette information, l'aérodrome le plus approprié semble être Nantes, à environ 1h de vol vers le sud-ouest, mais je déchante vite lorsque le contrôleur m'annonce que la météo y est en très nette dégradation. En continuant mes recherches, je repère l'aéroport de La Rochelle mais bien que la météo y soit favorable - et qu'elle va le rester ! - il est à 1h30 de vol au sud-sud-ouest, ce qui nous laisse peu de marge de manœuvre, vu que j'ai calculé environ 2h d'autonomie. C'est pour cette solution que j'ai opté.

Je décide de laisser faire le pilote auto pendant l'approche, et je prépare mes moyens radio et radionav pendant que le contrôleur me prend en guidage radar. J'en profite également pour me "désisoler" et briefer mes passagers, leur expliquer la situation, et mettre à profit la présence d'un passager en place avant droite. Je ne peux me souvenir d'aucune forme d'appréhension dans leurs voix, me gratifiant d'un simple "ah bein on te fait confiance !". J'explique à mon passager de droite, sachant qu'il a quelques notions de pilotage, qu'il doit guetter la rampe lumineuse - un peu comme en MCC, finalement : le PF pilote et le PNF regarde dehors.

"- Fox-Papa-Tango, turn left heading 250, cleared ILS approach runway 21, wind 200 degrees, 10 knots maximum 15."

Je tourne une dernière fois la molette du heading bug et appuie sur le bouton APP du G1000, qui se sera avéré d'un secours inestimable, à la limite de l'exemple, pour tous les détracteurs de l'EFIS, M'étant ré-isolé, je fais mes annonces techniques à voix haute comme j'ai appris à le faire avec Papy, mon instructeur. Lentement mais sûrement, le C172SP intercepte l'ILS de la piste 21 et j'observe l'évolution de la vitesse sol sur le MFD avant de préparer ma machine, pour une vitesse d'approche retenue de 60kts, avec les pleins volets, au "half-dot before glide". Pour le moment, il y a 20kts de composante arrière, et je majore grossièrement de 200m ma distance prévue d'atterrissage, mais sans grande surprise vis-à-vis des 2350m de LDA proposée par cette piste.

"Glide slope alive."

L'avion finit de s'établir sur l'ILS 21 et se met en descente. Au fur et à mesure, à une VS de 500ft/min, je prête une attention de plus en plus particulière à l'altitude et à la vitesse. Rapide coup d’œil au thermomètre, +8 degrés à 2000ft. Soudain, le sommet de la couche nuageuse s'illumine et en quelques secondes, le pare brise vire du noir profond de la nuit au blanc étincelant des phares led du F-PT, ponctué du clignotement régulier des strobe lights. Je concentre toute mon attention à l'intérieur de la cabine afin de garder mes yeux habitués à l'obscurité et à l'éclairage de mon G1000 et réduire le risque de désorientation spatiale.

"Hundred above."

Les deux puissants phares du Cessna se reflètent dans le nuage comme deux yeux. Je décide de me désisoler afin de pouvoir éventuellement entendre mon passager, en cas de besoin. A 100ft avant les minimas, on aperçoit le sol, mais pas encore de piste en vue. A peine quelques secondes plus tard, la rampe d'approche transperce littéralement ce qui reste de la couche. J'entends l'émerveillement de mes deux passagers dans l'intercom.

"Minimums, minimums"

Soulagement à bord. Cette annonce du G1000 a eu un écho particulier. Mais pas de relâchement, il reste encore une étape : il faut se poser avec 15kts de vent arrière. Plus la piste se rapproche, plus je sens l'avion filer à toute vitesse vers l'entrée de piste. Je m'applique à la manette des gaz et m'acharne dans mon circuit visuel entre l'extérieur, et mon PFD, pour suivre au mieux le glideslope et toucher au plus près des plots à la bonne vitesse. Moment décisif. J'arrondis. L'avion plane sans que je le retienne et finit par toucher de lui-même quelques dizaines de mètres après les plots. J'appuie sur le l'alternat et annonce "Foxtrot-Papa-Tango, speed is under control", puis donne mon intention de parquer l'avion pour la nuit. Nous ne pourrons pas aller plus loin ce soir. Je refais le plein et place l'avion à son point de stationnement pour la nuit.

Le soulagement laisse progressivement place à l'excitation. Je déterre de façon compulsive un câble PC pour ma GoPro, ayant hâte de voir ce que les images ont bien pu donner de cette percée. L'instant inoubliable a bien été immortalisé par la caméra, et nous nous empressons de le copier chacun quelque part, dont voici le montage final de la bande:




Nous sommes Lundi, il est 6h. Je ne suis même pas encore levé que je consulte la météo sur mon téléphone. Du brouillard givrant nous attend à Toussus et le radiosondage montre que c'est épais, pas de surprise quand la TEMSI m'affiche une zone de givrage modéré SFC-XXX. Pas le choix, il faut attendre jusqu'à la prochaine TEMSI, celle de 9h UTC. J'en profite pour prévenir qui de droit que je ne serai pas en mesure de rentrer avant midi à cause de la météo. La TEMSI de 9h n'est pas optimiste du tout. La visibilité est de 6000m et une large zone de givrage s'étend du sol jusqu'au FL120. Il faut encore attendre 3h pour la TEMSI de 12h UTC. Malheureusement, ce sera un nouveau NoGo, la zone de givrage modéré s'étendant de 1500 à 4500ft, suivie d'une inversion et d'un nouvel ISO 0°C vers le FL70. Rien de plus à faire, si ce n'est aller manger au restaurant de l'aéroport de Poitiers, qui est vraiment très bon. La TEMSI de 15h UTC sera le verdict final.


A la sortie de la dernière TEMSI à 15h UTC, nous pesons le pour et le contre: ce système perturbé s'installe durablement, donc si nous ne partons aujourd'hui, il ne sera pas possible de rapatrier l'avion avant Samedi, au plus tôt. Mais nous avons un problème avec le givrage dans les basses couches. D'après les radiosondages, la température descend jusqu'à -5° vers 3000ft avant de remonter à 0°C à 4000ft. Impossible donc de prévoir un dégivrage en altitude, le risque étant que l'on ne l'atteigne jamais, cette fameuse altitude de l'ISO 0 (le 172 n'est pas une foudre de guerre et je ne pense pas que l'accrétion de glace sur le bord d'attaque va l'aider). Cependant les METAR/TAF sont à l'orange foncé. Nous avons une fenêtre pour tenter de partir en VFR Spécial. La question est de savoir s'il est judicieux de tenter un vol d'une heure et demi avec des conditions de visibilité variant entre 5 et 8km, et un plafond n'excédant pas au mieux les 800ft/sol ? Finalement, le plus simple pour s'en convaincre, c'est de voir ça par nous même. On remet rapidement l'avion en état et grimpons pour un tour de piste.

"- Puissance décollage affichée. Badin actif, pas d'alarmes. 55kts, rotation."

Le Cessna 172 SP s'arrache du sol avec 15kts de vent face. Les chiffres s’égrènent sur l'altimètre. Nous sommes à 800ft/sol au début de la vent arrière, mais au fur et à mesure, la descente est forcée, jusqu'à ne plus avoir que 400ft en fin de vent arrière. La visibilité est également plus proche de 5km que de 8. Très loin d'être convaincu, j'annonce à la tour que ce sera un complet.



Cette fois c'est la bonne. L'avion restera au sol à Poitiers jusqu'à la fin de la semaine. Nous demandons à la sécurité de nous prêter deux grosses paires de cales pour sécuriser l'avion, le mauvais temps étant prévu toute la semaine, je préfère ne prendre aucun risque. Retour dans le terminal de l'aéroport. Nous organisons nos affaires et le retour sur Paris s'organise en TGV, grâce à l'assistance FFA, après une grosse journée d'attente, car il vaut mieux être au sol et regretter de ne pas en l'air, qu'être en l'air et regretter de ne pas être au sol.

Fly safe.

dimanche 27 juillet 2014

L'autre côté de la barrière

L'ambiance d'un club le matin, et en particulier à Saint-Cyr, m'avait beaucoup plu pendant mes quelques heures de PPL, que je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de terminer correctement. La formation ATPL touchant à sa fin, il était pour moi hors de question de rester chez soi à se morfondre devant la boîte email à se voir écrire que je n'ai pas assez d'heures et pas de QT. Alors je mettrai peut-être plus de temps à accéder à un cockpit d'airliner, mais je pense que ce ne sera qu'un plus en expérience, que de passer du temps de l'autre côté de la barrière: celle des instructeurs. C'est ma vision des choses. Ceci dit, ma perception du travail en club a évolué, après un petit temps (18 mois) à se formater a des concepts ultra-rigides en vue du commercial. Même si la qualification FI reste à mon sens un investissement tellement plus intéressant qu'une QT+AEL, j'ai choisi -pour moi- de pouvoir bénéficier d'une flotte la plus variée et la plus hétéroclite possible. D'où mon choix de me tourner vers l'aéroclub Paul Tissandier, plutôt qu'aux Alcyons.


Rendez-vous avec le premier élève à 10h30, pour un lâcher machine. J'ai pu constater très vite que, même en inversant les rôles, en se glissant dans la peau de quelqu'un que l'on n'est pas vraiment (du moins pas encore), et la proximité avec l'instructeur, que l'on finit par bien connaître, ça fait rentrer dans une petite bulle de confiance qui rend plutôt prévisible les erreurs qu'il va être amené à commettre, pour l'aspect démonstratif de l'instruction en vol. Maintenant, il faut, en plus de se sentir être responsable de la bonne conduite du vol, ce qui est inhérent à la région parisienne et à ses interdictions de survol de partout, apporter à la personne en place gauche ce qu'elle ne sait pas. D'ailleurs, ça peut aussi porter sur de l'anticipation de la météo, voire dans de l'identification d'indices atmosphériques, indiquant un phénomène particulier, comme le fait de passer sous l'enclume d'un CB en formation.


En plus, et pour moi, déjà, certaines techniques de pilotage sont devenus naturels, au point d'avoir du mal à définir ce qu'il faut percevoir. C'est ce qui permet de libérer de la disponibilité intellectuelle et de progresser dans la formation grâce à une capacité d'attention accrue; pour l'analogie, c'est un peu comme un bébé qui apprend à marcher: au début, le fait même de se tenir debout lui demande de la concentration, et de l'aide, puis progressivement, il va pouvoir réfléchir à mettre un pied devant l'autre, une fois que son sens de l'équilibre se sera un peu développé, avant de pouvoir commencer à courir une fois qu'il n'y a plus à réfléchir aux mouvements des pieds. Maintenant, transposer ça à un élève qui naturellement n'a pas la disponibilité de l'instructeur d'instructeur, qui a juste 10 fois plus d'heures que vous et qui donc, a nettement plus de ressources disponibles à accorder, ça met en lumière d'une façon assez phénoménale un point de briefing qu'il aurait été bon de voir avant le vol, et pas pendant, comme par exemple, l'utilisation de la réchauffe carburateur, pour un élève qui a été formé sur Cessna, et qui découvre le DR400 (Flex, si jamais tu me lis ;-)) ), ou encore les vitesses remarquables ...



Et puis, il y a quand même ce pour quoi on a été formé: instruire les futurs pilotes privés. C'est d'autant plus intéressant pour moi vu que les élèves que j'ai pour le moment ont une progression très vaste, allant des vols de découverte avant le cursus PPL, jusqu'aux pilotes lâchés à former aux navigations, aux déroutements, etc etc, en passant par les élèves à former aux tours de piste en vue des différents lâchés, la seule ombre au tableau restant la participation aux voyages-école, comme celui que j'avais fait à Alderney du temps où j'étais encore élève PPL. En fait, pour le moment, le principal problème pour moi reste de sortir de l'instruction très scolaire qu'on nous a appris pendant la formation, et qui me donne (à tort ?) l'impression de brider la progression de certains élèves. En fait, j'ai à la fois du mal à me détacher des briefings courts, mais en même temps, je ne vois pas comment aborder certaines notions qui me semblaient abstraites pendant la formation FI, et qui m'apparaissent comme indispensables aujourd'hui. C'est le métier qui rentre, à ce qu'il parait, alors au boulot. De toutes façons, le passage de l'aéroclub en ATO pour se mettre en conformité avec les exigences de l'EASA, ça impose de nouvelles procédures, de nouveaux programmes, et surtout, des nouveaux livrets de progression.



Autre point de détail que je redécouvre de façon exacerbée en vol, mais plus pour les élèves en formation, cette fois-ci, c'est: sentir son élève. Nous sommes tous plus ou moins sensible à l'environnement aérien, et au vol plus en général. Certes, avec 300h, c'est plus rare d'être malade en avion, mais au début, nous avons tous été gêné par une après-midi bien chaude, ou les pompes et les turbulences mettaient à mal notre estomac. Si à ça, on rajoute la concentration pour ne pas dépasser 1500ft - et ainsi éviter que ce vol ne soit le dernier de l'instructeur pour un petit bout de temps =))) -, le résultat c'est que j'ai déjà remarqué plusieurs fois les élèves recaler la bouche d'aération sur eux pendant le vol, signe pour moi qu'il faut un peu calmer le jeu, que ce soit au niveau des évolutions aussi bien qu'au niveau de la pression que l'on met sur le dos de l'élève, et vu que le stress est très communicatif, et que je le suis d'autant plus que le plafond en classe A est bas -1500ft au départ de LFPZ (il est déjà loin le temps des montées & descentes lissées que je faisais à ma 300nm solo dans le sud de la France)-, c'est d'autant plus difficile pour eux, tout comme pour moi, il faut bien l'avouer.


Pour revenir aux comparaisons "stage vs réalité", la formation FI nous a appris à placer notre niveau d'exigence en fonction des objectifs visés par l'élève, mais aussi à adapter notre discours à ses facultés d'apprentissage. C'est d'autant plus vrai en club, à mi-chemin entre l'association de pétanque et l'antichambre de la formation professionnelle. En fait, pour être plus précis, pour moi aussi, chaque vol est un apprentissage: celui de savoir correctement évaluer la prestation de l'élève, et c'est encore plus vrai, vu que le profil unique de l'instructeur est le contraire de ce qu'on rencontre en club. Je découvre au fur et à mesure toutes les facettes du cours de psychopédago qui remonte déjà à teeeeeeeellement loin ! Je me rassure en disant qu'il y en a au moins un que je détecte assez facilement, c'est l'élève pilote sur Flight Simulator, ce que j'ai moi-même été à mes débuts. Bon, du coup, je fais ce que mes instructeurs ont fait à ce moment là, ils m'ont planqué les instruments de bord, et j'ai été forcé de voler en regardant dehors. Comme quoi, la boucle est bouclée.


Un autre acquis de la formation FI que j'essaie de garder à chaque fois, c'est l'organisation du débrief. Toujours commencer par demander à l'élève de s'auto-évaluer, et à ma surprise générale, ils tapent quasiment tous dans le mile. Gros GG ! On voit ensemble ce qui ne va pas, et pour conclure, on passe sur le positif, tout ce qui m'a plus pendant le vol (note à soi-même: organiser mieux mes notes pendant le vol, et surtout, ne pas les avoir de façon parcellaire, quoique c'est difficile de guider l'élève pour l'atterrissage, de surveiller la radio, et d'écrire en même temps sur son calpin).

Allez, yapluka. C'est le début de la saison estivale, et je compte en profiter pour enlever ma restriction et passer le cap des 500 HdV en tant que Cdt de Bord sur avion. Autant profiter de cette période de latence qui arrive à pic, et qui sépare la sortie de formation du premier emploi de pilote professionnel. D'ailleurs, il reste quelques trous dans OpenFlyers, si jamais :)

vendredi 14 mars 2014

Mission Accomplished !

Je n'y croyais moi-même pas forcément au début, étant un adepte profondément convaincu du bon vieux Robin DR400, mais il faut bien le reconnaître, ce Diamond DA-42 est véritablement conçu avec le soucis de faciliter la vie au pilote ! Les petits raccourcis sur le G1000 en disent long et l'équipement embarqué n'a rien à envier à n'importe quel jet (sauf peut-être les performances de celui-ci ...). Et cette incroyable percée à Rodez a fini de m'en convaincre, alors que je découvrais tout juste l'avion dans les simulateurs.

Un simulateur ne vaudra jamais le vol réel, et ce sur tous les plans, et quelles que soient les conditions. Cette phrase va certainement surprendre beaucoup de personnes, alors que je suis moi-même un fervent défenseur de la simulation de vol comme outil d'apprentissage. Mais c'est précisément ce que je me suis dit lorsque je suis sorti de mes simulateurs. Le DA42 n'est pas un avion à représenter en simulateur (même si Mechtronix a clairement fait du très beau travail sur leurs conception) mais c'est un avion fait pour voler, et c'est bien ce que j'attendais de la part de cet avion. Les deux moteurs à pistons nous poussent à une TAS de 150kts le tout en maintenant le FL120, pour cause de limitation oxygène, et il ne nous reste plus qu'à nous en remettre aux mains d’Éole pour arriver plus ou moins vite, ce qui comprend biensûr la croisière à 80kts GS, et la descente au régime de croisière à 215kts GS.

Je m'arrête deux secondes ici pour faire un bilan: si je devais classer les 3 vols que j'ai préféré en DA42, il était obligé que je parle en premier de notre escapade à Cannes Mandelieu avec une météo peu favorable, un atterrissage trèèès long, et une prévision en forte dégradations jusqu'à ne plus avoir les minimas pour en redécoller. Dans cette liste de 3 vols, aussi, il était obligé de classer en n°2 la GCA que j'ai faite à Toulon, sur l'invitation d'une de mes connaissances, avec en option une traversée de couche magnifique, sans compter l'adrénaline que procure la découverte de ce type d'approche pendant la finale. Enfin, pour moi, mon solo de nuit en DA42 est à ranger en n°3 pour l'énorme sensation de liberté que j'ai eu durant une petite heure, seul à bord. Pourtant, je pense que ce classement est faussé car à la base, en établissant le classement de mes 3 plus beaux vols, ceux qui m'ont réellement marqué, seul un vol en DA42 figurait sur la liste, mon vol de Cannes, et en 3° place en plus (les deux premiers étant le retour d'Alderney au FL115 en DR400 et la Nav de 300NM solo en DA40).

Finalement, j'ai limite envie de dire: on s'en fout. Je vous conseille de vous munir, au choix, d'un bon paquet de chips, d'un bol de pop-corn, ou bien encore d'un bon thé chaud, et de juger par vous-même ce que vaut ce DA42. Au final, j'ai beaucoup apprécié tous mes vols en DA42, même si certains étaient plus fatigants que d'autres, et c'est sans doute pour cela qu'il est si difficile pour moi d'en faire un top 3 sans être de pure mauvaise foi. Encore une fois, je remercie beaucoup mon instructeur, grâce à qui je peux garder une trace indélébile de ma prise d'expérience sur bimoteurs, qui a sûrement été l'un de mes moments les plus agréable de toute la formation. 


C'est donc maintenant chose faite: je suis CPL/IR-ME. En rentrant chez moi, j'ai voulu dresser la liste de tous les terrains que j'ai visité en DA42. Ils ne sont pas forcément nombreux (bon, il y a tout de même 16 terrains, tous avec leurs particularités !) mais ils sont très disséminés, ce qui est assez représentatif de l'envie de voyager qui nous prend quand on embarque dans le DA42.


Pour la suite, retour aux simulateurs de vol pour la MCC, avec la découverte d'un nouvel avion, un turboprop cette fois-ci: le Piper PA31 Cheyenne.

Bons vols !